Michel Bussi : Maman a tort
Maman a tort de Michel Bussi 3,75/5 (08-05-2015)
Maman a tort (512 pages) est sorti le 7 mai 2015 aux Editions Presses de la Cité.
L’histoire (éditeur) :
Quand Malone, du haut de ses trois ans et demi, affirme que sa maman n’est pas sa vraie maman, même si cela semble impossible, Vasile, psychologue scolaire, le croit. Il est le seul… Il doit agir vite. Découvrir la vérité cachée. Trouver de l’aide. Celle de la commandante Marianne Augresse par exemple. Car déjà les souvenirs de Malone s’effacent. Ils ne tiennent plus qu’à un fil, qu’à des bouts de souvenirs, qu’aux conversations qu’il entretient avec Gouti, sa peluche. Le compte à rebours a commencé. Avant que tout bascule. Que l’engrenage se déclenche. Que les masques tombent. Qui est Malone ?
Mon avis :
Maman a tort, le nouveau roman de Michel Bussi, est selon moi le roman idéal pour vos vacances. C’est un petit policier (de 500 pages quand même) qui se lit très agréablement pour lequel on se laisse facilement embarquer.
Cependant, après avoir pris tellement de plaisir avec le Nymphéa Noir (dont la technique et le twist final m’ont sciée !) et Ne lâche pas ma main, après avoir découvert le travail méticuleux de Code Lupin (impressionnant de minutie), ce nouveau titre ne m’a pas totalement comblée. Sans vraiment avoir à lui reprocher quoi que ce soit, j’ai été prise dans l’histoire sans éprouver autant d’intensité qu’avec les autres.
Ceci dit, on ne s’ennuie pas avec Maman a tort. L’histoire très intrigante de ce gamin qui raconte au psy de l’école que son doudou lui parle et que sa maman n’est pas sa maman, s’entrelace avec une assez bonne part de crédibilité avec celle d’un braquage à Deauville vieux de 10 mois, dans laquelle un couple a perdu la vie et dont deux braqueurs sont toujours en fuite et activement recherchés. Je n’irai pas jusqu’à dire que le suspens atteint des paroxysmes mais on est tout de même pris par un sentiment d’urgence qui rythme agréablement la lecture. L’auteur fait preuve d’une construction particulière et judicieuse qui permet de revenir sur les quatre jours qui précèdent la scène d’ouverture, en insistant au fur et à mesure d’avantage sur les derniers instants cruciaux de l’intrigue en nous les présentant de points de vue différents retardant ainsi la chute (dont, comme d’habitude, je ne me suis pas doutée) et créant encore plus de tension. Au fur et à mesure que l‘on progresse dans le livre, il devient presque impossible de le lâcher. Pour ça, pas de doute, Michel Bussi est fort ! C’est un auteur particulièrement addictif.
Les personnages quant à eux n’ont pas été spécialement attachants mais ça n’a pas du tout gâché ma lecture. En découvrant les noms de la plupart d’entre eux, j’ai bien cru que l’auteur allait nous faire un de ses tours de passe-passe et nous pondre une fin rocambolesque explosive. Allez savoir… et si ce gosse qui vit dans un univers onirique ne nous menait pas en bateau depuis le début, et si tous les personnages qui gravitent autour n’étaient pas sorti de son imagination ? Parce qu’il n’est pas simple de discerner la fiction de la réalité dans le discours de Malone, et que les caractères portent des noms tels que Augresse, Lechevalier, Pasdeloup, Moulin, Dragonman, on a de quoi avoir des doutes et se poser des questions (surtout quand on sait que Michel Bussi est capable de sacrés retournements de situation).
Bon, je me suis fourvoyée…Mais ça ne m’a pas empêchée pour autant de ne pas continuer à analyser le discours de l’enfant, de creuser le rapport étroit entre Zerka le braqueur et la famille Moulin (si des fois, il en existait un), et de tenter de démêler toute cette affaire. Pas facile, évidemment et c’est aussi ce que j’aime chez l’auteur : ses fins sont impossibles à prévoir, tant les personnages et les ficelles s’entremêlent.
Alors voilà, Maman a tort est pour moi un très bon livre de vacances. C’est un policier simple, à l’écriture dynamique et aux chapitres bien découpés. Ce n’est sans doute pas le meilleur livre de l’année mais ce nouveau Michel Bussi reste nul doute un excellent divertissement (on passe facilement au-dessus de certaines situations improbables). Ce n’est pas non plus pour rien qu’il est l’un des auteurs français les plus lus en France (et le premier auteur français de roman policier lu en 2014).
Edit du 12 mai 2015 :Conférence de l'auteur du 11 mai 2015 ici
Edit du 8 juin 2015 : Compte rendu de la rencontre avec l'auteur le 4 juin 2015
Ce jeudi 4 juin, les nouveaux locaux de Babelio accueillaient leur toute première rencontre. Michel Bussi est en effet venu présenter à une quarantaine de lecteurs ses deux dernières parutions, Maman a tort chez Presses de la cité etN’oublier jamais chez Pocket. D’un côté, N’oublier jamais conte l’histoire d’un jeune handicapé amateur de course et témoin du suicide d’une jeune femme. Accusé (à tort ?) du meurtre de cette dernière il se retrouve confronté à des forces qui le dépassent. De l’autre, Maman a tort, le neuvième roman de l’auteur présente l’histoire de Malone, trois ans et demi, qui affirme que sa mère n’est pas la vraie. Sa mémoire, comme celle de tout enfant, est fragile, mais Vasile, son psychologue scolaire, décide de le croire et enclenche alors un engrenage auquel il ne peut plus échapper. Deux romans exaltants de destinées chamboulées du jour au lendemain.
L’auteur, un architecte marionnettiste
L’auteur est d’abord interrogé sur la conception de ses romans. “Chaque histoire s’écrit différemment” commence par expliquer Michel Bussi qui ne débute jamais la rédaction de ses oeuvres avant plusieurs mois de construction. Insistant sur l’importance du rythme et de la cohérence qu’appelle le genre policier, il raconte comment une histoire se construit et s’épaissit par elle-même lorsqu’elle est réussie. Si Michel Bussi ne commence jamais à écrire sans savoir exactement où il va il n’en est pas de même pour ses personnages : “En revanche, je maîtrise mes personnages, c’est moi qui tire les ficelles”. Alors que certains auteurs se vantent de l’autonomie de leurs héros, Michel Bussi préfère éviter les surprises, de l’avis que le genre du polar ne permet pas une telle liberté narrative.
Écrire, un exercice solitaire
Particulièrement intéressés par les dessous de l’écriture romanesque, les lecteurs interrogent ensuite Michel Bussi sur la place que tient son entourage dans le choix de ses histoires. “Les rares fois où je demande l’avis de mes proches, ils me dévisagent”. Prétextant qu’un roman policier se résume mal en quelques phrases échangées avec ses amis, il préfère ne présenter son travail qu’une fois la version quasi finale terminée. En revanche, passé plusieurs mois d’écriture, il devient difficile de se replacer au niveau d’un lecteur. C’est là le seul contexte dans lequel il requiert une aide extérieure.
Des héros ordinaires au destin unique
La peur de s’ennuyer, voilà la première raison pour laquelle Michel Bussi ne fait jamais appel aux mêmes personnages. Il partage à ce propos sa vision de ses romans, qu’il conçoit comme des tranches de vies de personnes ordinaires. “Mes personnages changent, vieillissent, je ne pourrais pas les faire revenir. Et souvent, ce qui leur arrive est tellement extraordinaire, que cela ne pourrait se reproduire deux fois dans une vie”. Son genre de roman ? Ceux où il est impossible de savoir ce qu’il va se passer. Les lecteurs plaisantent, ils appelle ça “le twist à la Bussi”.
L’imagination au cœur de l’écriture
Les lecteurs ont ensuite orienté leurs questions vers le travail documentaire que nécessite l’écriture d’un roman policier. Contre toute attente, Michel Bussi réfute et les coupe d’entrée : la recherche documentaire est bien loin de représenter la majorité de son travail. “Je n’aime pas trop le réalisme, il empêche de faire marcher l’imagination”. Souvent, pour planter ses décors, l’auteur se contente de photographies et de souvenirs de sa Normandie natale pour ensuite arranger le décor grâce à son imagination. Et il en est de même pour les sujets scientifiques. Pour rédiger Maman a tort, dans lequel il est beaucoup question de la fragilité de la mémoire d’un enfant de trois ans et demi, à part quelques forums et un échange avec une spécialiste, lui permettant de donner un âge crédible à Malone, Michel Bussi a préféré offrir un roman qui ne soit pas trop technique “Je voulais que ça reste un roman portant sur quelque chose que tous les parents puissent observer”.
Papa a tort ?
Par la suite, une lectrice interroge Michel Bussi sur la prédominance des figures féminines dans son roman Maman a tort. L’auteur, jeune papa, explique avoir voulu s’intéresser cette fois à la figure de la mère. Derrière les questions directement soulevées par le roman comme “doit-on tout dire à un enfant ?”, “jusqu’où peut-on aller pour un enfant ?”, il avoue avoir cherché à évoquer la relation charnelle et particulière qu’une mère entretient avec son enfant. “En tant que père, je me pose moins de questions, car il y a plein de choses que je ne peux pas maîtriser dans les premières années.”
Écrire, c’est jouer
Enfin, la soirée se clôture sur un échange autour du jeu et du rôle de l’imaginaire dans la littérature de Michel Bussi. Les lecteurs l’ont remarqué notamment pendant la lecture de Maman a tort où la plupart des personnages possèdent des noms à résonance fantastique comme la commandante Ogresse ou le Lieutenant Chevalier. “Bien sûr, l’histoire est un prétexte pour évoquer le merveilleux”. L’auteur explique qu’il avait depuis longtemps envie d’un roman à propos des mondes oniriques de l’enfance. Selon lui, si ses livres se vendent, c’est parce qu’ils diffèrent et ne tombent pas dans le réalisme noir, un genre très en vogue ces dernières années. Ce qui l’intéresse, c’est le mélange des genres et surtout de pouvoir s’adresser aux adultes comme aux enfants, genre incarné à la perfection à ses yeux par Le Petit Prince de Saint Exupery. Le jeu est une activité sérieuse qui permet de devenir soi-même selon Michel Bussi qui espère que ses romans sont pris comme des jeux, car ce qui l’intéresse “c’est jouer et faire semblant.” La séance de questions-réponses s’est poursuivie avec l’habituelle série de dédicace suivie d’un petit buffet pendant lequel les lecteurs ont pu échanger avec l’auteur.
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