Michel Bussi : N'oublier jamais
N'oublier jamais de Michel Bussi 3/5 (02-06-2015)
N’oublier jamais (500 pages) est paru le 7 mai 2014 aux Editions Presses de la Cité et est disponible en version poche depuis 7 Mai 2015 chez Pocket (544 pages).
L’histoire (éditeur) :
" Vous croisez au bord d'une falaise une jolie fille ? Ne lui tendez pas la main ! On pourrait croire que vous l'avez poussée. " Il court vite, Jamal, très vite. A cause de sa prothèse à la jambe et autres coups du sort, il a un destin à rattraper et l'ambition de devenir le premier handicapé à réaliser l'une des courses d'endurance les plus ardues du monde, l'Ultra-Trail du Mont-Blanc. Parti s'entraîner, ce matin de février, sur la plus haute falaise d'Europe, il a d'abord remarqué l'écharpe rouge accrochée à une clôture ; puis la vision d'une femme, incroyablement belle, les yeux rivés aux siens, prête à sauter dans le vide. Ils sont seuls. Le temps est suspendu. Ultime recours, Jamal lui tend l'écharpe, mais la femme bascule. Quelques secondes plus tard, sur les galets glacés de la plage déserte, Jamal trouve le corps inerte de l'inconnue, un filet de sang qui s'échappe du crâne. A son cou, l'écharpe rouge. Ceci est la version de Jamal. La vraie ?
Mon avis :
N’oublier jamais (j’ai un mal fou avec ce R que je veux systématiquement remplacer par un Z !) est un roman qui laisse le lecteur avec une impression d’être mené un bateau tout du long. Impossible de prévoir la fin (et pour cause) !
Le roman commence par un début de correspondance, que l’on oublie très vite, entre la gendarmerie d’Etretat et l’Institut de Recherche criminelle de Rosny sous-bois (93) à propos de la découverte de trois squelettes découverts dans l’effondrement d’un pan de la falaise.
Le roman se lance ensuite dans l’intrigue principale, le récit de Jamal Salaoui, un jeune homme de banlieue parisienne (issu de la cité des 4000 à la Courneuve) venu passer quelques jours à Yport, près d’Etretat. Malgré son handicap (il possède une prothèse à la jambe) Jamal, s’est lancé le défi de participer à Ultra-Trail du Mont-Blanc, une course mythique extrêmement physique. Pour cela, il court tous les matins sur la plus haute falaise, mais ce 19 février 2014, il tombe sur une écharpe rouge et croise la route d’une magnifique jeune femme apeurée, la robe déchirée et sur le point de sauter. Il tente de la retenir avec l’écharpe mais la femme au regard plein de tristesse saute. Il est le seul à avoir vu la scène. En bas, deux autres témoins l’ayant juste vue tomber découvre son corps sans vie l’écharpe autour du cou…Après avoir laissé son témoignage à la police, Jamal rentre à l’auberge où il trouve une enveloppe à son nom relatant un fait divers similaires d’il y a 10 ans…
L’histoire que l’on pensait être seulement celle de Jamal (pris dans les méandres des suspicions dans la mort de Magali Verron), devient autant la sienne que celle de Morgane Avril, retrouvée violée, étranglée et jetée du haut de la falaise. L’affaire que vit Jamal fait étonnement écho avec celle de 2004 dans laquelle le tueur n’a jamais été retrouvé. Et, à mesure que le jeune homme reçoit (anonymement) des rapports de gendarmerie et des revues de presse, on découvre ce terrible drame, répété quelques semaines plus tard avec la mort quasiment identique de Myrtille Camus, et surtout l’ampleur de l’histoire dans laquelle Jamal vient de tomber. Seul témoin, et quasiment seul suspect, la pression monte pour lui autant que pour nous, car même si on le sait innocent (ou du moins on l’espère, car on est rapidement plus sûr de rien) les éléments ne jouent pas en sa faveur.
Michel Bussi a l’art de nous mener par le bout du nez, mais on finit par se douter que quelque chose se trame derrière tout ça. Rien n’est clair et c’est ce qui fait de ce titre une lecture addictive et stressante. Les pistes sont nombreuses, les rebondissements s’enchaînent à vitesse grand V, les doutes s’installent insidieusement et les sentiments vont bon train entre la suspicion et l’empathie. Je me suis constamment demandé si l’auteur ne nous rejouait pas le film Shutter Island version Haute-Normandie, Leonardo Dicaprio remplacé par un jeune beur unijambiste. C’est très troublant…
N’oublier jamais est un thriller prenant (la simplicité de l’écriture de Michel Bussi est toujours aussi plaisante) et déstabilisant. Je ne m’attendais pas à cette fin-là, ou plutôt à ces fins-là, car l’auteur est plus qu’imaginatif et réserve de sacrées surprises (rappelez-vous cette correspondance du début de roman…). Pour le coup, ce qui m’a plu est également ce qui m’a contrariée car pour nous surprendre l’auteur use de ficelles et l’histoire se révèle vraiment tirée par les cheveux. Vous avez beau chercher les indices, vous êtes loin, très loin de la vérité. Vous avez beau creuser et tenter d’élaborer un scénario, vous restez dans le flou. Ça a beau vous tenir en haleine (ce besoin de savoir vous rend preste marteau), ça augment aussi vos attentes quant au dénouement. Alors lorsque celui-ci tombe ça ressemble plus à un tour de passe-passe improbable et grossièrement servi qu’une réponse pertinente à nos attentes.
En gros : N’oublier jamais est une bonne lecture mais j’ai trouvé la fin décevante (révélant en plus un nombre d’invraisemblances important).
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