Mathias Malzieu : la mécanique du coeur
La mécanique du cœur de Mathias Malzieu 4/5 (28-11-2012)
La mécanique du cœur (177 pages) paru aux Editions Flammarion le 22 octobre 2007, est disponible depuis le 17 avril 2009 en version poche aux Editons J’ai lu (160 pages).
L’histoire (éditeur) :
Edimbourg, 1874 : le jour le plus froid du monde. Lorsque Jack naît, son cœur gelé se brise immédiatement. La sage-femme le remplace par une horloge et le sauve. Depuis lors, il doit prendre soin d'en remonter chaque matin le mécanisme. Mais gare aux passions ! Le regard de braise d'une petite chanteuse andalouse va mettre le cœur de Jack à rude épreuve...
Mon avis :
Ecrit à la manière d’un conte, le roman de Mathias Malzieu nous entraine dans la vie de Jack. A sa naissance en plein hiver glacial, son petit cœur fragile gèle. Heureusement, Madeleine, la femme qui le met au monde est une (sage)-femme bricoleuse. Elle le répare et l’adopte. Le petit Jack au cœur d’horloge vit sa vie entre putains et êtres abimés (au sens propre comme au figuré). A son dixième anniversaire, il fait la rencontre de la plus belle des jeunes filles, à la voix si mélodieuse qu’elle l’envoute littéralement. Son petit cœur s’affole tant que Docteur Madeleine le met en garde contre les dangers de l’amour. Mais rien n’y fait, Jack est fou et souhaite coûte que coûte revoir la mystérieuse. Après trois années d’école inutiles, à affronter le terrible Joe, Little Jack prend la poudre d’escampette et traverse l’Europe pour retrouver sa belle Andalouse.
« Le mystère qui entoure cette petite chanteuse m’émoustille. (…) j’entretiens son souvenir comme on prendrait soin d’une fleur délicate. Ça me fait de grosses journées.
Je ne pense qu’à une chose, la retrouver. Goûter encore cette indicible sensation, le plus vite possible. Je risque d’en cracher des oiseaux par nez ? Il faudra me réparer le cœur plus souvent, et alors ? On me le repart depuis que je suis né, ce truc. Je suis en danger de mort ? Peut-être, mais je suis en danger de vie si je ne la revois pas, et, à mon âge, je trouve ça encore plus grave.
Je comprends mieux pourquoi le docteur tenait tant à retarder ma confrontation avec le monde extérieur. Avant de connaître le gout des fraises au sucre, on n’en demande pas tous les jours. » Chapitre 3 (page 47-48 de l’édition France Loisirs)
La mécanique du cœur est un roman qui n’est pas sans rappeler l’univers Burtonien, tout en métaphores, en personnages cabossés et en messages véhiculés avec beauté. L’écriture a beau être très imagée, elle ne l’est pas trop et la lecture reste un vrai régal : fluide et magique. Les descriptions poétiques s’allongent sur plusieurs lignes mais je l’ai trouvais toujours trop courtes. Personnifications, allégories, métaphores filées sont employées avec grâce et ponctuées d’humour (cl le hamster de Jack, pour ceux qui l’ont lu !). Oui, le style de Malzieu m’a conquise !
L’histoire quant à elle est sympathique. La mécanique du cœur est le voyage initiatique de Jack, allant d’une colline reculée d’Édinbourg à un cirque extraordinaire en Espagne. Le suivre dans la recherche du bonheur, de son amour au péril de sa vie est très plaisant. L’auteur mélange l’imaginaire et le réel, on faisant croiser le chemin de son héros à celui de Jack l’éventreur ou bien celui de Georges Méliès. Inutile de vous cacher que Jack est extrêmement touchant, parce que rejeté dès sa naissance, blessé, amoureux fou, fragile, innocent, au cœur rêveur… Ses amis (Madeleine, Anna, Luna et Arthur) sont tout aussi intéressants mais malheureusement peu présents à mon goût. Quant à Miss Acacia… sa personnalité et son comportement m’ont empêché de l’apprécier. Je n’ai aimé que sa beauté hispanique et j’ai tant regretté que Jack en tombe amoureux.
Malzieu fait succinctement mais finalement suffisamment le tour de la question amoureuse où jalousie, acceptation de l’autre, doute, douleur, plaisir….sont autant de sentiments qui habitent Jack. Et il transmet de belles valeurs (un peu de façons élémentaires je trouve mais bon…) : il faut croire en ses rêves et aller au bout pour enfin les voir se réaliser (retrouver ici la belle Miss Acacia) ou bien encore que les faiblesses peuvent être des atouts et que les différences font également partie des charmes de chacun.
« Si tu as peur de te faire pal, tu augmentes les chances, justement, de te faire mal. Regarde les funambules, tu crois qu’ils pensent qu’ils vont peut-être tomber lorsqu’ils marchent sur la corde raide ? Non, ils acceptent ce risque, et goûtent le plaisir que braver le danger leur procure. Si tu passes ta vie à faire attention de ne rien te casser, tu vas terriblement t’ennuyer, tu sais…Je ne connais rien de plus amusant que l’imprudence ! Regarde-toi ! Je dis « imprudence » et tes yeux s’allument ! Ah ah ! Quand à quatorze ans on décide de traverser l’Europe pour retrouver une fille, c’est qu’on a un sérieux penchant pour l’imprudence, pas vrai ? » Page 102-103 de l’Editons France Loisirs
En fin de compte, je trouve que ce petit livre serait une lecture parfaite (quoi que très imagée) pour des lecteurs plus jeunes. Hop, hop, hop ! Adultes qui lisez ce billet, ne passez pas votre chemin. Laisser vous bercer par les mots de Mathias Malzieu et parcourez son univers surprenant. Son roman se lit agréablement et rapidement et même si la fin n’est pas ce qu’il y a de plus exceptionnel, il vaut sans conteste la peine d’être découvert.
« Edimbourg et ses rues escarpées se métamorphosent. Les fontaines se changent une à une en bouquets de glace. L’ancienne rivière, habituellement si sérieuse dans son rôle de rivière, s’est déguisée en lac de sucre glace qui s’étend jusqu’à la mer. Le fracas du ressac sonne comme des vitres brisées. Le givre fait des merveilles en pailletant le corps des chats. Les arbres ressemblent à de grosses fées en chemise de nuit blanche qui étirent leurs branches, baillent à la lune et regardent les calèches déraper sur une patinoire de pavés. Les froid est tel que les oiseaux gèlent en plein vol avant de s’écraser au sol. Le bruit qu’ils font dans leur chute est incroyablement doux pour un bruit de mort.
C’est le jour le plus froid du monde. C’est aujourd’hui que je m’apprête à naitre » chapitre 1
Note : écrit par le chanteur du groupe français Dionysos, Le mécanique du cœur ne pouvait s’écrire sans musique. Je vous invite fortement à écouter les titres pendant votre lecture mais surtout après, pour en saisir tout le sens.
L'avis de Kyradieuse, morgaxia, Kayleigh
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