Maria Paola Colombo : Entre deux silences
Entre deux silences de Maria Paola Colombo 5/5 (04-04-2014)
Entre deux silences (388 pages) est paru le 13 mars 2014 aux Editions Presses de la Cité.
L’histoire (éditeur) :
Quel avenir attend Cica quand elle survit à la mort par noyade que sa mère avait choisie pour elle ? La peur de l'eau. Une peur viscérale, qu'il s'agisse de la mer ou d'un mince filet au robinet. « Cica » est le surnom dont les enfants de la colonie de vacances l'ont affublée à cause des deux marques qu'elle porte sur le dos, comme les cicatrices d'ailes déchirées. Elle est née dans une petite ville du nord de l'Italie, elle a pour compagnon un chien-loup et les livres prêtés par une voisine, une grosse dame solitaire et généreuse qui sait garder les secrets.
Comment mener une vie normale quand on est atteint du syndrome de Down ? Aîné de trois frères et soeur, Walker est né un jour d'été, dans les Pouilles, avec un chromosome en plus. Bien que sa famille attentionnée l'entoure et le chérisse, s'efforçant de lui offrir une vie normale, Walker sait qu'il est différent. Les yeux d'Angelo, son frère cadet, le lui rappellent chaque jour.Cica et Walker ne se connaissent pas, ils ne savent pas qu'ils ont la même innocence, la même audace: deux âmes légères et obstinées comme deux pousses de chiendent. Tandis que la bobine de leur vie se déroule, ils ignorent qu'une nuit d'octobre les attend : une rencontre explosive et révélatrice, un de ces rares moments capables d'illuminer l'obscurité et d'enfin faire imprimer sur la pellicule le négatif de l'amour.
Mon avis :
Roman à double intrigue, Entre deux silences promet, sur la quatrième de couverture, une rencontre « surprenant et révélatrice ». C’est donc dans cette attente que nous commençons à suivre les deux destins : celui de Cica, une enfant de cinq ans qui se retrouve seule avec son père après avoir survécu au suicide de sa mère dans lequel elle a tenté de l’entraîner, et celui de Walker, un gamin de neuf ans atteint du syndrome de Down, qui vit une vie paisible avec ses parents, ses frère et sœur et son ami Stecco. L’attente s’envole bien vite, à mesure que grandissent le plaisir et l’intérêt à suivre ces deux gamins. D’épisode en épisodes on parcoure leur enfance, puis leur adolescence, entre le déménagement de l’une et sa rencontre avec Tomba (son chien secret) et Carmelina (une voisine âgée qui devient son seul lien social après l’école), et la vie sereine de l’autre ponctuée de quelques aventures à la hauteur de tout vrai fan de Walker Texas ranger qui se respecte ! L’attachement pour l’un et l’autre est immédiat. Ils sont différents mais possèdent la même innocence et la même hardiesse. Leurs vies respectives qui n’ont pourtant rien en commun (ni de commun) est finalement amener à se croiser une dizaine d’année plus tard, dans des circonstances à la fois douloureuses et émouvantes.
Quel plaisir de découvrir la plume de Maria Paola Colombo. Le texte mêle la naïveté de l’innocence et une grande intensité. Symboles même de la différence ces deux protagonistes sont touchants (pour des raisons totalement différentes). Le traumatisme de Cica et l’absence (physique et affective) de son père m’ont mise mal à l’aise, et sa solitude m’a serré le cœur. A ce titre, j’ai adoré l’amitié avec sa voisine retraitée (qui retrouve alors un second souffle grâce à cette gamine qu’elle prend sous son aile), tout comme l’amour viscéral qui l’unit à son chien. L’auteur, sans s’étendre dans une longue narration pathétique, arrive à transmettre une force émotionnelle importante. Ses mots sont simples mais dégagent une intensité qui soulève beaucoup d’empathie.
L’auteure aborde des sujets difficiles (la trisomie 21 et le suicide maternel) et porte son roman vers une réflexion sur les difficultés relationnelles, le besoin d’affection et le bonheur. C’est un beau roman, émouvant (mais pas du tout larmoyant) parce que ces protagonistes sont jeunes et blessés mais le tout raconté de façon naturelle et simple. Les petites touches d’humour et d’amour dans le récit de Walker apportent un peu de légèreté qui contraste avec le traumatisme de Cica. Même si on sent que la tension dans la fratrie est présente (Angelo, le cadet, a un mal fou à trouver sa place face à un frère qui accapare forcément toute l’attention), la famille reste très unie, contrairement à beaucoup dans ces difficultés de la vie.
En deux mots : un roman que je vous conseille pour ces deux héros et aussi pour les multiples personnages secondaires que l’on ne fait que croiser mais que le n’oublie pas pour autant.
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