Benoît Minville : Je suis sa fille
Je suis sa fille de Benoît Minville 3,5/5 (16-02-2014)
Je suis sa fille (253 pages) est sorti le 4 septembre 2013 dans la collection Exprim' des Editions Sarbacane.
L’histoire (éditeur) :
C'est l'histoire de Joan, qui a été élevée par son père sur fond de hard rock et de westerns. C'est l'histoire du père de Joan, un visage de plus écrasé par le Grand Capital. C'est l'histoire de Hugo, le meilleur ami de Joan, qui décide de l'accompagner pour quand elle hurle : Il faut que ça change ! Je veux que ça s'arrête ! On va tuer le Grand Patron ! Deux ados embarqués dans un road-trip ébouriffant, sur la N7 direction Nice... Ils ne savent pas ce qui les attend. L'aventure. L'amour. Les rencontres. Fuck la crise, vive la vie.
Mon avis :
Benoît Minville transmet dans son premier roman un lot d’émotions qui touchera sans difficultés ses lecteurs. Sur une base simple mais percutante, il nous emporte dans un road trip qui ne laisse pas indifférent.
La veille de ses 17 ans, Joan, portée par un esprit de vengeance, décide de traverser la France pour rejoindre Nie où elle compte venir à bout d’un homme qu’elle ne connait pas mais qu’elle estime responsable des souffrances de son père, celui par qui sa famille se retrouve à jamais brisée. C’est Hugo, son ami de toujours, qui prend les rênes de ce voyage totalement improvisé. A bord de la Ford Mercury de son grand frère Vasco, Hugo embarque Joan et ils se lancent sur les routes (et de la mythique Nationale 7), avec des haltes dans de petites bourgades loin de ce qu’ils connaissent en Région Parisienne (un peu comme des étapes du Tour de France) qui leur permettent de faire des rencontres et de réfléchir… Même à des centaines de kilomètres, le père de Joan reste à ses cotes (témoignant de leur fort attachement) pour lui remonter le moral et lui prodiguer quelques conseils (avec parfois un ton moralisateur de papa qui se respecte).leurs conversations fictives (faites de souvenirs surtout) la poussent à aller de l’avant, mais lui donne aussi beaucoup de vague à l’âme, lui rappelant inévitablement la réalité.
Le style emporté ne manque ni d’humour ni d’émotion, et encore moins de rythme. L’auteur nous propose de faire le voyage aux cotés de Joan (avec un récit au présent livré de son point de vue) et en musique avec des références musicales variées mais tout de même résolument rock, qui vont à merveille avec l’histoire. Les dialogues sont justes et collent bien aux personnages (16-18 ans) : directs et avec leurs lots de références jeunesses, de phrases tueuses, drôles ou agaçantes (Hugo possède une répartie magnifique !). Je suis sa fille est un roman moderne et bien ancré dans une réalité que beaucoup connaissent : la crise, le chômage, les familles recomposées (décomposées aussi), un système qui nie de plus en plus les valeurs humaines… Tous les sujets ne sont pas profondément développés mais ne reste pas pour autant superficiels. Ils trouvent assez bien leur place dans l’intrigue qui fait quand même moins de 260 pages.
Les personnages ont tous une histoire. Joan bien sûr. Elle a grandi dans un cocon paternel que l’on envierait presque, fait de rigueur, de tolérance et de beaucoup beaucoup d’amour. Mais aujourd’hui, elle doit en sortir (par un magistral coup de pied au derrière). Elle est en colère et complètement perdue. Contre quoi, contre quoi ? C’est ce qu’elle tente de comprendre avec ce voyage initiatique qui l’a conduira vers l’âge adulte. Hugo (qui a survécu à deux maladies), petit con des cités, fantasque et rudement attachant (c’est, loin de ce qu’il laisse imaginer, un meilleur ami en or). Il y a aussi Vasco, son frère, le bon bougre qui ne vit que pour son auto, Djib le bac +++ mais noir…et encore Blanche, une gosse de la DASS (jeune femme courageuse qui en vu…) que l’on découvre avec surprise dans un rôle inattendu. Bref, un roman de jeunes pour les jeunes, mais pas que, puisque j’ai pris un grand plaisir à les accompagner.
La facilité matérielle liée au voyage est peut être un poil peu crédible, mais les personnages et le côté humain du roman l’emportent et portent le lecteur dans cette aventure sans que l’on se pose plus de questions. Aussi, si le style au début m’a un peu déstabilisée, j’ai vite été prise par l’écriture saisissante de Benoît Minville qui transmet les joies et les peines avec force. Je trouve que Je suis sa fille est un bon roman jeunesse (conseillé à partir de 13 ans) qui, sans approfondir certains aspects, véhicule tout de même un message fort.
J'en profite pour vous inviter chaudement à découvrir les Editions Sarbacane qui diffusent de très bons livres jeunesses.
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