Fabrice Colin : Ta mort sera la mienne
Ta mort sera la mienne de Fabrice Colin 3.75/5 (02-04-2013)
Ta mort sera la mienne (350 pages) est le dernier roman de Fabrice Clin, paru le 28 mars 2013 aux Editions Sonatine.
L’histoire (éditeur) :
Une soixantaine d'étudiants, un motel grand luxe dans les plaines de l'Utah : tout est prêt pour un séminaire littéraire de rêve. Et puis, au soir du premier jour, un homme arrive, coiffé d'un casque de moto, et sort un fusil à pompe de son sac. Le rêve tourne au cauchemar. Terrifiée, rendue à moitié sourde par les détonations, une jeune fille trouve refuge dans une chambre où se terre déjà Karen, sa conseillère d'éducation. À voix basse, les deux femmes engagent la conversation. Karen en est sûre : elle connaît le tueur. Obèse, mélancolique, Donald traîne son spleen existentiel en attendant la retraite. Il aurait voulu être indien ; il n'est que chef de la police. Ce soir-là, un mail arrive au poste. Prise au coeur d'une fusillade dans un motel de Moab, une employée appelle au secours. Dans le miroir des toilettes, l'homme en larmes, effaré, contemple son reflet. Ce motel-là, songe-t-il. Précisément aujourd'hui. Il s'appelle Troy, mais les noms n'ont plus d'importance. La fin du monde approche. Oh, il ne la craint pas. Le Feu du Ciel, il le sait, l'épargnera. En attendant, Troy s'arrête dans des diners, Troy parle à des gens, Troy baise, médite, et serre les poings. Dans sa tête : la rumeur grandissante d'avant l'apocalypse. Dans son sac de hockey : un fusil à pompe calibre 12. Trois voix, trois personnages, trois destins irrémédiablement liés, sur les terres tragiques du rêve américain et de l'illusion mortelle.
Mon avis :
Que dire de Ta mort sera la mienne ? Que ça commence très fort, et que ce n’est qu’un début…
On se retrouve en pleine tuerie. Alors qu’une soixantaine d’étudiants se retrouvent trois jours dans la vallée du Moab pour une section d’écriture créative, un homme en tenue de motard (casque à visière abaissée, combinaison noire et bottes assorties) avance et tire méticuleusement sur chaque personne. Une étudiante arrive à s’échapper pour trouver refuge dans l’un des bungalows adjacents, où Karen, conseillère d’éducation, est déjà présente. Un dialogue commence entre les deux femmes, cherchant solution, cause, coupable ou tout simplement revenant sur sa vie.
Donald Crossen, chef (par intérim) de la police voisine, à quatre mois de la retraite, prend connaissance d’un étrange appel d’urgence et file avec son équipe sur les lieux. En chemin, il repense à sa carrière, sa grande histoire d’amour, ses déceptions et ses peines.
Troy, le tireur, abat les étudiants et le personnel avec un sang-froid incroyable, ne leur laissant aucune chance. De toute manière la fin du monde est proche, ils sont déjà tous perdus. Mais que cherche t-il réellement ici dans au Red Cliffs Lodge ?
La tuerie de Moab est l'occasion de revenir sur 3 vies, celles Karen, Donald et Troy. Leur destin est lié c’est certain. Peu d’intrigue mais un retour perpétuel sur le passé. On comprend d’ailleurs très vite ce qui relie ces trois protagonistes, mais la tension n’est pas pour autant diminuée. Plus on avance dans l’histoire de Karen et dans celle de Troy et plus le malaise s’installe. Comment un homme peut-il en arriver à un tel acte ? Sa jeunesse dans le Refuge, des années de souffrance, de maltraitance, d’abus en tous genres et de lavages de cerveau (centré sur la colère vengeresse de Dieu qui viendra par le feu du Ciel) ont sans aucun doute amené Troy à « péter un câble ». Mais pourquoi ici et pourquoi ces jeunes ?
Fabrice Colin a choisi d’alterner les chapitres sur trois points de vue différents. Un pour chaque protagonistes, avec une particularité sur celui concernant Troy, écrit à la deuxième personne (tu, tu, tu, tu…) et aux dialogues sans ponctuation adaptée (mais où sont passés les tirets !). L’atmosphère liée à chaque histoire est particulière entre Donald, vieux paumé au mal être pesant, et Karen dont le seul but dans la vie semble être la nécessité de sauver les gens et prendre leur malheur (la pratique du Bouddhisme tantrique l’amenant à faire des rencontres destructrices). Les flashbacks concernant Troy sont parfois à la limite du soutenable. Plus on avance, plus ce triangle narratif donne du sens au présent mais ça devient lourd et malsain.
Pour une première rencontre avec le style de Fabrice Colin, je n’ai pas été déçue. Son écriture m’a plu (les phrases sont toutes très courtes et directes). Sa manière de diriger le récit (difficile de parler d’intrigue tant le puzzle est fragmenté) est spéciale mais cette façon de revenir sur chaque vie et de tenter de comprendre ce qui les ont conduit ici m’a tenu en haleine. J’ai aimé le chemin choisi par l’auteur pour justifier cet excès de fureur ou tout simplement cette folie : les dérives (et ses ravages) des groupes sectaires. Et puis surtout, cette description de la tuerie est faite avec un très grand soin. Dans le genre gore, c’est assez efficace ! On fait forcément le lien avec Anders Behring Breivik, le tueur de l’île d’Utoya en Norvège, dont la fusillade en juillet 2011 avait fait 69 victimes (essentiellement des adolescents). Quand la fiction rejoint la réalité, ça faire froid dans le dos.
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