Libre-R et associés : Stéphanie - Plaisir de lire

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Benoit Minville : Rural noir

Rural noir de Benoit Minville   5/5 (17-02-2016)

 

Rural noir (256 pages) est disponible depuis le 18-02-2016 dans la collection Série Noire des Editions Gallimard

 

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L’histoire (éditeur) :

 

Adolescents, Romain, Vlad, Julie et Christophe étaient inséparables ; ils arpentaient leur campagne et formaient un «gang » insouciant.

Puis un été, tout bascule. Un drame, la fin de l’innocence.

Après dix ans d'absence, Romain revient dans sa Nièvre désertée, chamboulée par la crise, et découvre les différents chemins empruntés par ses amis.

Évoquant à la fois La guerre des boutons de Louis Pergaud et la tradition du «country noir» américain, oscillant entre souvenirs de jeunesse et plongée nerveuse dans la réalité contemporaine d'une «France périphérique» oubliée de tous, Rural noir est un roman à la fois violent et tendre ; évoquant l'amitié, la famille, la culpabilité.

 

Mon avis :

 

Après 3 romans jeunesses (dont deux quand plus orientés jeunes adultes), Benoit Minville s’essaye au roman noir. Et pas chez n’importe qui (Gallimard, quand même…), on ne peut donc qu’envisager du bon. 

En même temps, Benoit Minville sais écrire. Ça c’est sûr (il l’a prouvé avec ses précédentes publications) !!! Il gère la narration et le rythme comme un chef et signe là un tournant maîtrisé et sans doute logique sans sa carrière d’écrivain. J’espère quand même que ce n’est pas la fin des petits romans de chez Sarbacane…

 

Bon, revenons-en à Rural noir. C’est d’abord et avant tout une amitié en béton, que beaucoup vont essayer de briser ou d’amocher, mais quand on aime c’est pour la vie !

Vlad (capitaine), Julie, Romain (le narrateur) et son petit frère Chris forme « le gang ». Point de loubards ici. Non, juste 4 jeunes de 14 ans (ou presque) sortant de l’enfance,  vivant à la campagne dans un hameau de la commune de Tamnay-en-Bazois (Nièvre) passant leur été  cul et chemise, inséparables, explorant parfois le monde des adultes mais toujours à l’affût des bonnes occupations de gamins.

Les années ont passé. Rom a tout quitté à la mort de ses parents il y a 10 ans, le village, les copains et la famille (laissant Chris livré à lui-même gérer le deuil et le reste…) et il est aujourd’hui de retour. Seulement ce qui aurait pu être un moment merveilleux de retrouvailles perd de son éclat lorsque Vlad est retrouvé presque mort, roué de coups, à quelques kilomètres de chez eux.

« Le retour au bercail laissait un arrière-gout de sang » Page 54

 

Rural noir c’est évidement un roman fort sur l’amitié, mais pas que. C’est un roman profondément humain et français ( bien profonde la France !!!) et aussi hyper sombre. Benoit Minville y décrit le souvenir d’une relation bien plus forte que la camaraderie  (presque de la fraternité) très touchant. Cette description  risque de rappeler beaucoup de choses de l’enfance aux lecteurs. De mon côté, ça m’a fait vachement de bien de me replonger dans mes étés avec les copains, ceux que l’on ne côtoyait que durant les deux mois de vacances (et qu’on ne faisait que croiser le reste de l’année) et avec qui nous partagions mille aventures casse-cou en cachette des parents. Ah mais je m’égare. Et je vous arrête tout de suite, Rural noir ce n’est pas un joli roman tendre non plus, parce que les choses finissent par basculer…

Le récit oscille entre passé et présent, avec d’un côté l’insouciance, l’enfance, la simplicité, les vacances et cet esprit de liberté qui va avec, et de l’autre la réalité sociale du monde rural que la ville gangrène peu à peu (précarité, ennui, justice privée…).

« Tout était né dans les jours qui suivirent cette parade de sourires grisés par l’alcool et l’amitié. L’innocence serait fauchée durant cet été là. » Page 11

Le passé, indissociable du présent, laisse toujours des traces et c’est sur ces traces que nous emmènent l’auteur. De façon remarquable d’ailleurs. Non-dits, trahison, violence et calculabilité conduisent l’intrigue qui arrive malgré tout à rester marquée par une forme de tendresse et d’humanité à toute épreuve.

 

Benoit Minville manie la narration avec tellement de talent ! Ses mots sont simples mais percutants. Ses phrases sont courtes mais cognent fort, certaines arrivent à faire sourire mais d’autre font mal (« J’ai une boule de la taille des couilles du gros taureau du père de Lulu dans la gorge, je suis nul, mais j’y vais. » Page 171) et en quelques mots il donne le ton et décrit merveilleusement l’atmosphère (je crains quand même que le mot « merveilleusement » ne soit pas tout à fait approprié…).

Bref, chapeau Monsieur Minville. C’est une entrée remarquée et remarquable que vous vous autorisez là. J’ai été sous le charme des vos personnages, un peu refroidie par l’intrigue (et tant mieux. On est dans un roman noir, bordel !), j’ai adoré votre style toujours dans le ton (celui de l’enfance, de l’adulte, du pequenot, de la racaille…) et surtout j’ai trouvé l’ensemble riche en émotion et ça, j’aime !!!

 

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18/02/2016
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