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Sandrine Collette : Juste après la vague

Juste après la vague de Sandrine Collette    5/5 (28/12/2017)

 

Juste après la vague (336 pages) est sorti le 18 Janvier 2018 dans la collection Sueurs froides des Editions Denoël.

 

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L’histoire (éditeur) :

 

Suite à l'effondrement d'un volcan dans la mer, la maison d'une famille est isolée du reste du monde, cernée par les flots. Madie et Pata, les parents, comprennent que leur salut est de quitter leur îlot dans leur barque qui ne peut contenir que huit personnes. Ils doivent choisir entre leurs enfants. Un matin, Louie, Perrine et Noé trouvent la maison vide et un mot de leurs parents.

 

Mon avis  : 

 

Depuis 6 jours, Pata, Madie et leurs 9 enfants sont coincés sur le petit bout de terre, depuis que la vague (raz de marée provoqué par l’effondrement d’un volcan d’une île alentour) a englouti leur île et ses habitants. Perchés sur leur petite colline, ils sont les seuls survivants encore présents.

 

« La vague avait déferlé sur le monde et avait tout emporté, maisons, voitures, bêtes et humains par milliers, attrapant les chairs et les murs en béton pour les enfouir sans les lames et les courants effrayants, les écraser, les gober sans retenue – si elles s’étaient retirées,  les eaux auraient laissé derrière elles des champs lessivés jonchés de corps morts et de débris d’os, de métal et de verre, mais elles n’étaient pas redescendues, elle s’étaient installées là, envahissantes et meurtrières et depuis six jours elles charriaient des arbres arrachés, des poutres brisées, des cadavres au ventre gonflé que les petiots regardaient passer en essayant de les reconnaître. » Page 10

 

Depuis 6 jours le niveau de l’eau ne baisse pas et les secours ne sont jamais arrivé, alors la décision de tout quitter germe dans l’esprit des parents. Et lorsque 12 jours après, la tempête frappe désormais leur ilot, la décision tant redoutée est prise : les parents et 6 de leurs enfants prendront place sur la petite barque dont l’espace ne permet pas un autre voyageur…

 

« Et la mère avait tout compris, comme il s’en doutait, parce qu’à ce moment-là elle posa sur lui un regard de feu, haine et désespoir mêlés, un regard qui l’accusait définitivement – et elle murmura, comme si c’était lui, rien que lui, comme si tout était de sa faute, la mer, la tempête et le malheur :

-Qui vas-tu laisser ? » Page 29

 

Trois enfants sont ainsi abandonnés, trois sont laissés sur la colline où l’eau continue toujours de monter et grignoter leur petit bout de terre. Tandis que Pata et Madie (le cœur brisé, la rancœur et la honte qui tenaillent le ventre) et leurs 6 enfants voguent vers les terres épargnées avec la promesse de revenir chercher les trois autres une fois les autres débarqués.

 

« Madie a répété : Plus d’amour. Plus d’honneur. Nous sommes comme des bêtes. Et elle s’est tue, parce qu’elle a croisé le regard de Pata, pas besoin de mots pour entailler l’âme et la chair n’est-ce pas, le silence suffit, quand il se charge de tant de chose, et c’est le père qui avait repris le souffle et la parole en premier après ce silence-là, le mal était fait. Rien n’effacerait jamais le mutisme de la mère, rien n’empêcherait les mots qu’elle n’avait pas prononcer de tourner dans la tête de Pata, qui se demanderait chaque jour s’il n’y avait pas quelque chose de vrai là-dedans, et pourtant non, Dieu, il le jurait, quand il avait choisi la mort dans l’âme le nom des trois petiots qui resteraient, pas une fois cela ne lui était venu à l’esprit, c’est Madie qui croyait ça, Madie qui avait fini par cracher, parce que c’était trop lourd :

-(….) Nous finissons ce que la nature a commencé. » Page 37

 

En alternance, on accompagne les trois enfants restés seuls sur ce bout d’île toujours plus petit et les autres sur leur embarcation face au climat déréglé, à la violence de la mer qui essaye régulièrement d’en arracher un de la barque, face à la faim qui les tenaille et fait brayer les plus jeunes, face aux fausses joies qui frappent fort et face à l’absence, la culpabilité qui pèse sur la mère, face à la douleur et la mort….

 

Juste après la vague est un récit encore une fois parfaitement maîtrisé. On suit avec une grande tension et tellement d’émotions la survie des uns et des autres, les choix impossibles, impensables. On subit la cruauté de l’abandon, la colère et la culpabilité qu’imposent certains choix.  Le souffle court, le cœur battant, on espère… on redoute un drame (un nouveau), on frémit, on pleure et on souffle enfin une fois la dernière page tournée.

Juste après la vague est une lecture physique et intense. Parce qu’une fois aux cotés de cette famille éclatée, impossible de les quitter avant d’arriver au bout, mais quelle aventure !!!!

 

C’est encore une fois évidemment très fort, mais en s’attaquant à la famille, Sandrine Collette fait mouche plus intensément encore. Si elle surprend à chaque roman (quant aux choix des thèmes, des lieux, des faits si différents d’un roman à l’autre), elle confirme aussi avec cette nouvelle publication une maîtrise indéniable du suspens, autant que des mots (avec une écriture qui s'affine de romans en romans). 



28/01/2018
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