Libre-R et associés : Stéphanie - Plaisir de lire

Mygale de Thierry Jonquet            4/5 (17-09-2011)

   
 
J'ai découvert Mygale (156 pages, éditeur Gallimard) avec la publicité faite autour du dernier film d'Almodovar "la piel que habito" (tiré du roman de Jonquet). Bien que je sache absolument rien à l'histoire, ma curiosité a pris le dessus. Et puis, ce n'est pas un hasard si Almodovar en a fait un film...aucun regret !
J’ai adoré ce livre, bien qu'assez dérangeant. Mygale est mon premier Thierry Jonquet, mais je pense faire prochainement l'acquisition de plusieurs de ses autres romans.

L’histoire :

Il y a l’histoire de Richard Lafargue chirurgien plastique brillant et médiatisé. Richard Lafargue vit en banlieue dans un splendide demeure avec Eve, femme mystérieuse dont la beauté égale sa soumission : plastique parfaite et totalement à la merci de Richard qui la séquestre, drogue et force à se prostituer tout en jubilant devant l’horreur qu’elle subit.

Il y a l’histoire d’Alex Barny qui vient de faire un casse qui a mal tourné : blessé par balle et démasqué. Il a abattu un flic (père de famille) avant de prendre la fuite avec l’argent du braquage. Recherché activement, il se planque depuis plusieurs semaines quand il décide de remédier à ses ennuis par la chirurgie plastique.

Et enfin, il y a l’histoire de Vincent Moreau, jeune motard d’une vingtaine d’années, poursuivit par un homme dans la foret et enlevé. Retenu captif dans une cave, enchainé durant des mois (d’abord nu dans le noir) et même des années. On suit peu à peu l’évolution de sa relation entre lui et son bourreau (qu’il nomme « mygale ») qui commence peu à peu à prendre soin de Vincent : le nourrit de plats fins et savoureux, le comble d’attentions (toiles, musique classique, livres et même un piano). Bien qu’enfermé, Vincent commence à se plaire dans cet univers de plaisirs où il perd ses repères et doucement ses souvenirs. Soumis, il voue une confiance totale en « Mygale » et ne se méfie plus de rien et ne craint ni les piqures quotidiennes, les médicaments ni ses changements physiques.

Mon avis :

Le style est sans chichi littéraire, direct. On lit le texte rapidement et avec plaisir. J’ai englouti ces 150 pages en une après midi. L’écriture est agréable et à la portée de tous (mais attention pas le sujet !).

Le texte est construit comme un puzzle où les détails s’accumulent pour enfin s’assembler dans un épilogue glaçant. Il s’agit de 3 histoires mêlées dans un même récit. On se doute que ces trois protagonistes sont liés et qu’ils ont quelque chose en commun. Mais de quoi s’agit-il ? Alex et Vincent sont des amis de longue date (on l’apprend très vite), Alex a besoin d’un chirurgien plastique et se tourne vers Richard Lafargue mais quel est le lien entre le couple Richard/Eve et « Mygale »/Vincent ? Pourquoi le récit concernant Vincent est-il en italique ? Cette construction astucieuse donne beaucoup de dynamisme au livre. L’alternance entre les 3 sujets entraine le lecteur jusqu’au dénouement sans aucun temps mort.

Quant au sujet, il s’agit avant tout de mettre en avant les penchants pervers des hommes et leurs cotés les plus sombres (viol, violence, prostitution…). Thierry Jonquet, avec beaucoup de talent, décrit les plans machiavéliques d’une vengeance. « Mygale » est un être mauvais dans les faits mais les causes qui l’ont poussées à cela empêchent le lecteur de le haïr. Chacun des protagonistes n’apparait ni bon ni mauvais, juste habité par ses pulsions malsaines, ce qui met parfois mal à l’aise lors de la lecture.

Difficile de dire pourquoi j’ai aimé sans en dévoiler d’avantage car l’effet du roman tient dans son dénouement. J’en ai déjà beaucoup écrit, alors je n’en dirais pas plus au risque de gâcher votre lecture. Il me tarde maintenant de voir le résultat en film, avec Antonio Banderas en Richard Lafargue, chirurgien terrible !