Libre-R et associés : Stéphanie - Plaisir de lire

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Rebecca Lighieri : Les garçons de l’été

Les garçons de l’été de Rebecca Lighieri     4,5/5 (06-03-2018)

 

Les garçons de l’été (441 pages) est sorti le 3 janvier 2017 aux Editions P.O.L. Il sera disponible en version poche le 5 avril 2018 chez Folio (413 pages).

 

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L’histoire (éditeur) :

 

Études brillantes, famille convenable et convenue, beauté radieuse et maîtrise du surf, Thadée et Zachée ont cru que l’été serait sans fin. Que la vie se passerait à chevaucher les vagues, entre jaillissements d’embruns et poudroiements de lumière. Mais en mutilant sauvagement Thadée un requin-bouledogue le prive de l’existence heureuse auquel il semblait voué : il est devenu un infirme. La bonne santé des uns, la sollicitude des autres le poussent à bout. Et le révèlent à lui-même...

 

Mon avis :

 

Les garçons de l’été, qui arrive en poche le 5 avril chez Folio, est un roman classé contemporain mais qui a tous d’un thriller/roman noir.

 

Un soir de décembre, Zach appelle sa mère, tremblant, arrivant à peine à lui annoncer le drame : Thadée, son frère ainé de 20 ans parti une année faire du surf à la Réunion, vient de se faire attaquer par un requin. Lorsque Mylène arrive en urgence à Saint Denis, elle découvre son fils amputé de la jambe gauche. Commence alors la chute inexorable de la famille Chastaing, comme si cet accident, et surtout la disparition de cette jambe, brisait l’édifice de cette petite famille bourgeoise parfaite.

 « Voilà. Avant que Thadée ne se fasse bouffer la jambe par un requin, j’étais un homme heureux. Ma vie professionnelle état une réussite – après tout, je suis le fils d’un facteur et d’une coiffeuse-, ma vie familiale me comblait, et ma maitresse parvenait à me donner le sentiment que j’étais un surhomme. (…)

Je sens bien que l’accident de Thadée a bouleversé la donne, a introduit une faille dans mon beau système. » page 107

 

Les garçons de l’été est une belle réussite ! La construction du roman, lente, minutieuse, alternant les points de vue des diverses protagonistes (ils sont nombreux) permet une immersion terrible dans cette famille bien sous tous rapports, parfaite même en apparence (un père pharmacien, une mère qui a choisi d’arrêter la médecine pour s’occuper de son foyer, des garçons magnifiques, costaux qui mènent des études brillantes, dieux du surf pendant leur temps de libre) mais qui cache des secrets, des vices et des rancœurs. Et au milieu, il y a Ysé, la petite dernière de 10 ans, plus en retrait, une artiste un peu farfelue, douce et généreuse, qui voit tout et entend tout mais qui reste bien silencieuse…

« Je suis bête mais j’ai envie d’être un homme, un homme avec des pensées et des désirs raisonnables, un homme avec une vie intérieure avouables, au lieu de ce maelstrom répugnant où voisinent ma femme, ma maîtresse – sans compter des filles tout juste majeures. Oui mais voilà, je n’ai jamais trouvé le bouton sur lequel appuyer pour mettre fin au film. J’ai honte de ce qui me traverse l’esprit, mais ça ne m’empêche pas d’être traversé, parfois même transpercé de part en part, secoué, retourné, bouleversé, par mes petits scénarios intimes. Je n’ai pas seulement envie d’être un homme, j’ai envie d’être un homme bien. » Page 103 

 

Ah, comme les Chastaing sont beaux, comme ils font envie avec leur réussite ! Mais, comme l’habit ne fait pas le moine et comme il ne faut pas se fier aux apparence, je vous laisse imaginer ce qui se cache derrière tout cela.

« Thadée était toujours Thadée, mais je réalise aujourd’hui que quelque chose, déjà avait changé en lui, quelque chose s’était inexorablement tordu, je ne sais pas. Quelque chose que pas plus hier qu’aujourd’hui je ne suis en mesure de décrire ou d’expliquer.

Le Thadée d’aujourd’hui, l’infirme, le geek misanthrope qui se terre dans sa chambre et ricane à tout discours optimiste tenu en sa présence, ce Thadée-là, il me semble que j’en ai pressenti l’existence il y a bien longtemps mais que j’ai refusé qu’il se substitue à mon frère, voire qu’il en écorne simplement l’image : je l’avais idolâtré toute mon enfance et je n’étais pas prêt à renoncer à mon héros. » page 169

 

Rebecca Lighieri manie la tension avec brio, c’est parfois à la limite du soutenable. Elle raconte à travers ses personnages, une histoire sombre, inquiétante et développe une tension qui vous agrippe fort, très fort. Le malaise est omniprésent. Entre les secrets inavouables des uns et des autres, les personnages bons qui sont malmenés, les violences sourdes qui se mettent à crier…. L’histoire prend des airs de thriller qu’on dévore avec grand intérêt, curieux de savoir comment tout cela va (mal) se terminer, jusqu’où ira se déchaînement.

« Ni ma mère ni mon père ne se sont aperçus de la crise que je traverse depuis le retour de Thadée. Leur propre chagrin les occupe à plein temps. Mais bon, je peux croire que Thadée est enfin dans de nouvelles dispositions et que les dommages collatéraux ne vont pas s’étendre davantage. Je veux le croire, mais l’angoisse mettra du temps à desserrer son emprise » page 211

 

Les vérités se dévoilent, les masques tombent, les culpabilités réveillent les choses tapies, secrètes et dévoilent des ressentiments forts… Les garçons de l’été est de ces romans qui possède les bases d’un roman idyllique (cadres, personnages…) mais qui justement vous entraîne dans ce quelque chose de sombre, poisseux et terrible. J’adore !

L’auteure attaque fort d’entrée avec l’annonce du drame. Puis, en alternant descriptions de cette façade bourgeoise (dont elle ne se gêne pas pour faire la critique) et la réalité/vérité crue, elle accentue le malaise et charge davantage en tension. Les divers points de vue apportent eux aussi leur part de complexité et de suspens. Le pire reste à venir, c’est certain mais que peuvent ils nous réserver ?

Quant à l’écriture, c’est juste un pur bonheur. J’ai adoré le style et la manière dont elle brosse ses personnages, des êtres terribles, touchants, inquiétants et perturbants mais tous travaillés avec acuité.

 

Les garçons de l’été est un roman original qui m’a vraiment bousculée. Jetez-vous vite le 5 avril sur ce poche, c’est 400 pages intenses, assez époustouflantes et particulièrement déroutantes. Une vraie réussite !!!!

 

 

« Je vous dis que je ne le reconnais plus, ce n’est pas Thadée. Et en en même temps, peut-être que c’est le vraie Thadée, en fait…C’est juste que je ne l’avais pas vu avant. Que je n’avais pas voulu le voir avant… » Page 149

« J’ai commis une faute et Thadée l’expie dans sa chair. Mais je vais me racheter, être désormais un homme irréprochable – et modérément heureux. » page 150

 

 

Retrouvez ici le booktrailer



22/03/2018
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